Courage et vérité
C’était le thème de l’ université d’été 2012 organisée par l’association « Acteurs d’Avenir » en partenariat avec le diocèse de Versailles.
Un thème qui devient plus qu’un message mais aussi un programme d’action pour les mois et les semaines qui viennent.
Accusé d’immobilisme, limité dans son action par les effets de la violente crise économique qui secoue notre pays, le gouvernement cède très clairement à une tentation : celle de mettre en œuvre des projets qui ne coûteront pas un centime au contribuable et donne l’illusion de la réforme et du progrès. Celui sur le « mariage et l’adoption pour tous », programmé pour cette rentrée, en est l’illustration parfaite.
Un piège
Sur ce sujet – et tant d’autres sur lesquels notre conception de l’homme est remise en cause – les chrétiens devraient se garder de tomber dans un piège. Celui de faire croire qu’ils s’y opposent au seul nom de l’Evangile.
Bien sûr, la Bible reste une source d’inspiration essentielle. Mais ce n’est pas d’abord en tant que chrétiens que les baptisés sont opposés au mariage homosexuel et à l’euthanasie mais d’abord au nom de l’homme. Cette conception anthropologique devra être mise en œuvre aux moyens d’arguments qui en appellent d’abord au bon sens … un mot qui passe mieux que « loi naturelle ». Les semaines qui viennent demanderont donc le meilleur de nous-mêmes. Et notamment de dire de façon claire, précise et percutante autour de nous, dans nos lieux de vie, au bureau, en fac, au travail, en interpellant nos maires et nos conseillers municipaux, toutes les bonnes raisons de ne légaliser ni le mariage entre personnes de même sexe ni l’adoption par des partenaires de même sexe. Ces arguments devraient pouvoir être défendus sans aucune coloration religieuse et mettre en valeur l’approche sociale et l’individualisme déstructurants véhiculés par ce projet.
Des représentants d’autres confessions, chrétiennes ou non (je rêve d’un plateau télé avec un rabbin, un imam et un prêtre détaillant leur opposition au mariage homosexuel …), pourraient se manifester. En attendant de rassembler très vite sur cette question des agnostiques, des incroyants ou même des indifférents au fait religieux : les chrétiens n’ont pas le monopole du bon sens, encore moins de la Vérité. Elle ne leur appartient pas. Il ne dépend pas de nous qu’une chose soit vraie ou fausse. Nous ne sommes que les « coopérateurs de la vérité » (c’est la devise de Benoît XVI), les témoins et les porte-voix.
Ponce Pilate et Jean-Baptiste
Vérité. Le mot n’est pas à la mode … Il est au-dessus des illusions ou des désirs passagers. Et la servir est une décision qui rime souvent avec courage. Il faudra du courage pour dire cette vérité autour de nous au lieu de protéger notre confort. Du courage pour ajuster notre action à cette vérité plutôt qu’à l’immédiateté de nos désirs ou nos intérêts.
Dans la Bible, deux figures nous regardent et nous interrogent. La première est celle de Ponce-Pilate. Il est entré dans l’histoire comme l’exemple historique de la lâcheté. En condamnant un homme qu’il sait pertinemment être innocent, il préfère sacrifier la vérité à son confort et sa carrière. Sa question ultime « qu’est-ce que la vérité ? » (Jean 18, 38) résonne dans nos églises chaque vendredi saint comme le comble du relativisme. Jésus, d’ailleurs, ne répond pas ; comme s’il savait que le procurateur de Judée a toutes les cartes en mains pour agir en conscience.
La seconde est celle de Jean-Baptiste. Il est la voix qui crie dans le désert et sa voix gêne. En osant dire au roi Hérode que sa femme n’est pas la sienne et que son mariage n’en est pas un, il marche lentement vers l’ultime offrande : celle de sa vie. Plus tard, Thomas More connaîtra le même sort et sera lui aussi un martyr de la vérité.
Tout cela pour un mariage et pas directement pour une vérité de foi, la divinité du Christ ou l’affirmation de la Trinité ! C’est dire si les enjeux sont importants : car tout ce qui contribue à la désintégration sociale met en danger notre civilisation. « Quelle société voulons-nous ? » disaient nos évêques il y a presque un an pour éclairer les consciences avant les échéances électorales. Le « mariage » homosexuel aujourd’hui, l’euthanasie demain, feront des victimes dont personne ne parle : l’enfant, les personnes âgées dépendantes, nos familles, l’Humanité tout simplement. L’Eglise – comme toujours – se range résolument du côté des petits et des faibles, du côté de la Vérité qui pour elle a un nom : Jésus-Christ.
Disons-le sans crainte et sans peur : cette époque attend très certainement d’autres Jean-Baptiste : des hommes et des femmes remplis de l’Esprit-Saint qui auront le courage de la vérité. Qui, sans attaquer les personnes, sauront mettre les mots qui s’imposent sur les actes et les situations. Serons-nous de ceux-là ?
Il y a deux ans, lorsqu’en Illinois est passée la loi sur les unions civiles, le cardinal archevêque de Chicago avait eu des mots très durs à la radio : sont-ils prophétiques ?
« I expect to die in my bed, my successor will die in prison, and his successor will die a martyr in the public square » (source).
Addendum : on me signale avec justesse qu’un livre est à lire en urgence. Son auteur y montre avec talent que le combat qui s’annonce est un combat d’idée, de bon sens et de culture.