Synode de la Famille : n’oublions pas non plus ceux-là…
On parle beaucoup des « divorcés-remariés » à l’occasion de ce synode de la Famille. Les pressions sont fortes pour que le magistère évolue. Contrairement à beaucoup d’autres, journalistes, théologiens ou « experts » souvent autoproclamés, je n’ai pas de certitudes à imposer au Pape François et aux évêques réunis autour de lui. Je crois qu’ils ont déjà la foi ! Et qu’ils connaissent l’enseignement de l’Eglise, bien mieux que moi… Je me refuse encore plus à revendiquer tel ou tel droit. Dans l’Eglise, on ne revendique pas, on fait confiance car on la croit assistée dans son gouvernement par l’Esprit-Saint. Ce n’est pas une formule facile pour éviter le débat. C’est au contraire dans les périodes troublées que cette vérité prend toute son importance. Au-delà des manœuvres et des pressions inévitables, au-delà des débats légitimes dans la fidélité à la foi, et de la recherche commune du bien des âmes, je crois que ce que le Pape enseignera au final, et les évêques en communion avec lui, sera conforme à la volonté de Dieu.
Mais j’aimerais simplement que dans le tourbillon des idées exprimées et des propositions exposées, le Pape, les évêques, les prêtres – les journalistes de la presse chrétienne en particulier – donnent une place et trouvent les mots pour reconnaître ceux dont on ne parle pas.
On ne parle pas de ces femmes et ces hommes, séparés ou divorcés, parfois malgré eux en raison de l’abandon par leur conjoint, qui essayent de rester fidèles à leur sacrement de mariage et renoncent pour cela à se donner à un(e) autre.
Ils souffrent en ce moment car on semble accorder peu de prix à leur chemin, voire le trouver inhumain ou impensable. Ces femmes et ces hommes ne jugent personne, et surtout pas ceux qui n’ont pas su (ou pu) prendre le même chemin. Ils ne revendiquent rien pour eux-mêmes, ne font pas de bruit… mais ils existent. J’en connais et mes frères prêtres également. C’est pour eux que j’écris ces lignes. Souvent blessés par l’échec de leur couple, ils essayent pourtant de garder un sens à la parole qu’ils ont un jour donnée. Leur fidélité douloureuse mais confiante est belle. Elle ressemble parfois à de l’héroïsme. Elle est nourrie de l’espérance fragile que leur fidélité sera féconde, d’une façon ou d’une autre. En tout cas, qu’elle plaît à Dieu et qu’Il la comprend. Elle se veut aussi un témoignage humble mais vrai donné aux enfants.
Je voudrais aussi qu’on encourage les couples qui peinent, ceux qui font de leur mieux pour vivre leur engagement en traversant parfois de grandes épreuves, ceux qui ont dû donner de grands pardons parfois si douloureux, ceux qui ont refusé de désespérer de l’autre ou de soi, ceux qui dans le quotidien se relèvent sans cesse et ne renoncent pas à apprendre à aimer. Il ne faudrait pas qu’ils finissent par se dire « à quoi bon ? » à force d’entendre que l’échec est « normal ». Non, ce n’est pas la « norme », même s’il n’est pas rare effectivement…
Oui, il nous faut sans cesse accompagner ceux qui peinent et ceux qui n’arrivent pas à vivre leur engagement ! Oui, tout le monde a sa place dans l’Eglise ! Oui, l’Eglise est cet « hôpital de campagne » selon l’expression du Pape, qui doit soigner les blessures, offrir la miséricorde, accueillir tout le monde sans jamais renoncer à la Vérité. Oui… mais n’oublions pas aussi ces témoins fragiles d’un Amour indissoluble. Eux aussi se sentent pauvres et ont besoin d’être encouragés. Leurs enfants ont besoin d’entendre que cette fidélité n’est pas vaine… qu’elle portera du fruit.
Je voulais leur dire merci, tout simplement. Car leur fidélité même douloureuse est pour nous tous comme une icône et un reflet de la fidélité de Dieu.
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NB : l’abbé Pierre AMAR a répondu à l’invitation du journal « La Croix » de croiser son regard et ses réflexions avec d’autres sur le synode romain. Dès maintenant et jusqu’au 19 octobre, retrouvez-le à cette adresse : « le blog du synode ».
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