Microphone

L’humilité, seul vœu pour 2022

Père Jean-Baptiste Bienvenu
29 décembre 2021

Souvenez-vous du début de l’année 2021. On entendait, en plus du traditionnel échange de vœux, des souhaits qui avaient presque la valeur de conjurations superstitieuses : « Cette année, grâce au vaccin, tout ira bien. » Un an après, il est temps de faire un bilan. Où sommes-nous rendus ? 

Relecture d’une année

D’abord, avec les derniers rebondissements du variant Omicron, force est de constater que l’épidémie ne se laisse pas maîtriser aussi simplement qu’on nous l’affirmait en début d’année. S’il est bien une expression qu’on aurait voulu entendre plus souvent dans la bouche des responsables, c’est : « je ne sais pas ». Car une épidémie de cette ampleur dépasse nécessairement les prédictions, et les mesures prises ne sont jamais qu’une contribution fragile pour chercher à accompagner le mouvement. Les scientifiques, et les hommes politiques à leur suite, n’ont-ils pas terriblement manqué d’humilité ? Semaine après semaine, nous avons dû subir l’énonciation sentencieuse de théories qui contredisaient souvent la version précédente, pourtant assénée avec autant de certitude, et par les mêmes personnes. On a entendu tout et son contraire, sur un ton qui prenait les Français pour des enfants, faute d’être capables de mériter leur confiance.

On retrouve le même constat de dureté dans nos cercles relationnels. Dans nos familles, entre amis, à la paroisse, combien de discussions désagréables, combien de prises de paroles définitives, combien de divisions dues à nos manques de délicatesse ! Et sur les réseaux sociaux, combien de commentaires arrêtés, combien de paroles violentes, combien de refus d’entrer en dialogue avec la pensée d’un autre… Que ce soit autour du vaccin, de la peur du virus, de la campagne d’Éric Zemmour, de la crainte de voir notre pays sombrer définitivement dans l’idéologie woke et ses dérivés, la violence a marqué le débat. 

Quelle victoire pour le démon de nous voir camper sur nos positions, plutôt que de chercher une solution concrète pour faire grandir la charité… Quelle victoire pour le diviseur de nous voir construire nos forteresses idéologiques, en face de celles de nos contradicteurs…

La voie de l’humilité

Le cours des événements aurait pu être différent si nous avions davantage travaillé la vertu d’humilité, ingrédient tellement caractéristique de la période de Noël, vertu par excellence des serviteurs. Selon une étymologie symbolique retracée par Claudel, l’humilité se rapproche de l’humidité et de l’humus. C’est d’ailleurs le sens du prénom Adam, qui signifie ‘le glaiseux’. Et Dieu lui dit : « Tu es poussière, et à la poussière tu retourneras » (Gn 3, 19).

Être humble, c’est donc avoir le sens de son origine. C’est savoir, à tous les moments de l’existence, d’où l’on vient et où l’on va, selon l’adage latin memento mori, « souviens-toi que tu mourras ». Être humble, c’est assumer et dépasser les peurs qui envahissent nos vies, en les mettant en perspective devant Dieu. Puisque notre destination, c’est le Royaume des cieux, notre engagement dans cette vie ne vise pas d’abord à construire un royaume terrestre et à remporter des victoires terrestres, mais à nous dépasser dans le don de nous-mêmes, à l’image de Jésus sur la croix.

Pour autant, choisir l’humilité ne signifie pas renoncer à combattre pour la justice et la vérité. Puisque l’humilité consiste à accueillir la vérité de ce que nous sommes, c’est justement cette vertu qui nous pousser à réaliser de grandes choses par fidélité à notre condition de chrétiens. La Vierge Marie, humble servante du Seigneur et Mère de l’Eglise, en est le meilleur exemple. Seul un cœur humble peut agir pour la justice et la vérité de façon adaptée, quand il le faut et comme il le faut. L’humilité est la clé qui libère nos énergies pour l’action.

Décision pour 2022

Alors soyons clairs : l’époque où nous vivons ne cesse de renforcer la prétention de l’homme à tout maîtriser, à tout tenir, à tout faire entrer dans les moules de ses théories. C’est vrai pour les hommes politiques et les scientifiques dans leur gestion de l’épidémie. C’est vrai également pour le quidam qui a son avis sur tout et qui l’assène avec dureté sur les réseaux. C’est vrai enfin de chacun de nous quand nous préférons rester dans l’espace fluide de nos idées au lieu de nous efforcer à la construction rugueuse de la charité.

Dans ce contexte, au lieu d’attendre les miracles politiques ou sanitaires qui n’arriveront pas, décidons-nous concrètement pour l’humilité. Relisons nos pratiques, nos actions, nos réalisations. Et en toute chose, disons-nous à nous-mêmes : « À bas l’arrogance, à bas la superbe, à bas l’outrecuidance et la suffisance. En 2022, je choisis l’humilité, la vraie, la belle, celle de notre Seigneur Jésus Christ. »

Seuls les humbles marqueront durablement l’Histoire.
Soyons de ceux-là.

Père Jean-Baptiste Bienvenu

Père Jean-Baptiste Bienvenu

Diocèse de Versailles, prêtre de la communauté de l’Emmanuel (emmanuel.info). Ordonné en 2016, vicaire à la paroisse de la Sainte Trinité à Paris. Enseigne la théologie morale au séminaire de Versailles. Il anime et coordonne l'équipe du Padreblog.

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