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Le carême, lieu du combat spirituel

Abbé Guy-Emmanuel Cariot
25 février 2020

Entrer en carême c’est entrer dans le combat spirituel. Cette expression peut nous stimuler : combattre, c’est espérer vaincre et en retirer de la fierté bien humaine. Mais le combat spirituel n’est pas cela. Au début du carême, il faut bien comprendre ce que recouvre cette réalité sous peine de rater son carême dès le mercredi des Cendres !

Développée dans un ouvrage qui vient de sortir (« La Citadelle imprenable », Mame 2020, à commander ici), voici une petite « méthode du château » pour apprendre à combattre le bon combat.

Notre vie est comme un village

Il faut imaginer sa vie comme un village entouré d’une enceinte. A l’intérieur, les différentes maisons symbolisent notre vie : il y a par exemple le réfectoire (notre lien à la nourriture et aux addictions), notre salon (lien avec notre famille et nos proches), notre chambre (lieu du repos et de la vie sexuelle), la bibliothèque (vie intellectuelle), la ferme (vie de travail), le théâtre (lieu de l’imagination) et l’église (lien à Dieu). La muraille qui entoure notre village en symbolise l’unité. Il faut s’imaginer marchant sur le chemin de ronde au-dessus du pont-levis. Nous sommes à la veille de notre vie et Dieu attend que nous puissions poser un regard juste sur celle-ci. Nous pouvons regarder l’intérieur du village et rendre grâce à Dieu pour toutes ces constructions et sur la beauté de ce petit bourg (au moins au niveau des plans !).

Quand le village est attaqué

Pourtant, nous pouvons aussi constater que notre village est régulièrement attaqué par l’ennemi. Qui est-il ? Il est tout ce qui nous fait du mal, qui empêche notre vie d’être vécue et qui cause notre malheur. Il s’agit des tentations auxquelles nous cédons (souvent ou toujours !) mais peut aussi être un lien spirituel ou démoniaque. Cet ennemi peut avoir plusieurs visages, souvent superposés les uns sur les autres. Le combat spirituel n’est pas une lutte personnelle contre cet ennemi : si nous l’affrontons, nous perdons et il pénètre sans problème par le pont-levis. Alors que faire pour combattre ?

Tourner le dos à l’ennemi !

Il faut savoir se retourner à temps du haut de notre rempart vers l’intérieur du village. Il y a en effet au cœur de notre village quelque chose dont il faut encore parler. Une colline en haut de laquelle se trouve un magnifique château plein de lumière. C’est le château du Dieu-Trinité qui habite en nous comme « l’hôte intérieur, plus intérieur à nous que nous-mêmes » (saint Augustin). A côté de ce château, toujours en haut de cette colline entourée d’anges, se trouve une petite maison fleurie, celle de la sainte Mère de Dieu et enfin une petite maison bien rangée et simple qui est notre âme spirituelle. Ces trois maisons sont invisibles à l’ennemi, même s’il est en train de saccager notre village. La première étape du combat spirituel est donc de tourner le dos à l’ennemi qui arrive en trombe contre nous. Une attitude à adopter immédiatement, dès que la tentation se révèle, sans aucun délai.

Implorer l’aide de Dieu !

La seconde étape est de s’adresser à Dieu en se tournant vers le château. A ce moment, il faut faire un acte d’adoration (« Mon Dieu, je t’adore de tout mon cœur » par exemple) puis crier vers lui : « Seigneur, viens à mon aide ! Ne laisse pas mon ennemi pénétrer dans ma ville ! ». C’est un cri qu’il faut alors pousser, pas une petite prière susurrée comme si on avait peur de déranger le châtelain ! Quand on coule, on ne chuchote pas « Au secours », on le crie ! Il en va de même ici.

Intérêt de cette méthode

On le voit, cette méthode de combat est autant un exercice qu’une prière. On peut ainsi agir autant de fois que nécessaire et en n’importe quelle circonstance. L’intérêt est aussi de ne pas parler à notre ennemi et de ne pas se croire assez fort pour le vaincre par nous-mêmes. Il est plus fort que nous. En se tournant vers Dieu, nous implorons le Seigneur des miséricordes de combattre lui-même pour nous. Cela ne nous rend pas passifs pour autant car l’âme du combat spirituel est dans ce « retournement » à effectuer dès que nous ressentons l’attaque. En nous faisant prendre conscience du mal qui nous attaque, cette méthode nous pousse aussi à renoncer à ce mal et à devenir meilleurs. Ainsi, chaque petite victoire sera un renforcement de notre citadelle.

Et s’il y a des brèches ?

Il y en a toujours. Elles peuvent être de différentes natures : vice enraciné, faiblesse psychologique, grand traumatisme lié à l’enfance, magie, etc. Ce sont comme des portes ouvertes à l’ennemi. Si notre pont-levis est remonté, cela signifie que la porte de notre liberté est fermée à l’action de l’adversaire. Mais l’ennemi nous attaque toujours par nos vulnérabilités. Chaque fois que nous ferons le retournement vers le château, les brèches se colmateront petit à petit. Il faut être patient et cela aussi est une grâce du vrai combat spirituel.

Un seul conseil pour ce carême 2020 : retournons-nous vers Dieu de tout notre cœur et aussi souvent que possible !

Abbé Guy-Emmanuel Cariot

Abbé Guy-Emmanuel Cariot

Diocèse de Pontoise, ordonné en 1996. Curé et recteur de la basilique d’Argenteuil (saintetunique.com), conseiller religieux national des Guides et Scouts d’Europe en France (www.scouts-europe.org), exorciste diocésain. Auteur de "La Citadelle imprenable" (Mame, 2020).

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