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C’est cadeau !

Abbé Thomas Poussier
25 novembre 2019

Dans quelques jours, c’est Noël ! Si nous avons cette chance, nous allons nous rassembler autour de notre famille. Qui dit Noël dit cadeaux… et il serait dommage de ne voir dans l’échange des cadeaux le 25 décembre qu’une suspecte emprise commerciale sur nos relations. Et si nous en profitions pour convertir notre regard sur les cadeaux afin de vivre de belles conversions ?

Un cadeau, en effet, renvoie bien plus que ce qui est concrètement offert à l’autre. Le cadeau est un signe puissant. C’est même un triple signe.

Le cadeau est signe du Don

C’est une évidence, mais il faut repartir de là. Le plus grand don, le plus grand cadeau, à Noël, c’est le Christ, le Verbe fait chair : Dieu Sauveur fait homme par amour des hommes, le Seigneur tout-puissant qui se fait tout-petit pour se mettre à la portée des tout-petits que nous sommes.

En recevant Dieu dans nos cœurs, en faisant, selon l’expression – presque – consacrée, de nos cœurs une crèche pour l’Enfant-Dieu, nous recevons la Vie, nous recevons ce que nous ne pouvons nous donner à nous-même. Recevoir la vie divine à Noël, c’est se replacer dans cette relation vivante et vivifiante avec le Sauveur. Dès lors, ce sont toutes nos relations qui sont vivifiées à nouveau. On peut signifier cela par des cadeaux qui seront signes de la vie reçue de Dieu. C’est bien parce que l’on reçoit le plus grand des cadeaux qu’on peut poser ce geste d’offrir des cadeaux aux autres. Il ne faut pas d’abord le croire suspect de collusion avec le commerce car le cadeau est gratuit – son étymologie en témoigne. C’est un geste d’un surplus d’amour : « Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement ! » (Mt 10, 8).

L’autre est un don

Une fois fondé dans le don de Dieu aux hommes, le cadeau nous introduit dans une autre signification. On signifie à la personne qui le reçoit qu’elle est un don pour nous. Là encore, nous sommes invités à rouvrir les yeux sur la gratuité de nos relations amicales et familiales, celles qui seront l’occasion de vivre un véritable échange de cadeaux. Certes, si on ne choisit ni ses parents ni sa famille, on choisit ses amis, mais pas pour ce qu’ils nous apportent en termes d’avantages ou de biens matériels. Que Noël soit l’occasion de témoigner à l’autre qu’il est un don pour nous, un signe de la bienveillance de Dieu à notre égard, un surcroît de vie et d’être !

Je suis un don !

Voilà la troisième signification du cadeau, sans doute la moins simple à accueillir : en donnant un cadeau, je signifie aussi que j’en suis un ! Si Dieu est le Don pour moi, si les autres sont aussi des cadeaux pour moi, il ne faut pas oublier que je suis moi-même un don pour les autres ! Il n’y a pas là matière à orgueil, car je suis lucide, je sais bien que le cadeau que je suis comporte failles et faiblesses. Mais là n’est pas l’essentiel. Noël peut être ce moment où je fais mémoire de la valeur de ma vie, où je me rappelle que, indissolublement lié à l’amour de Dieu et des autres, il y a l’amour de moi-même (à redécouvrir en Mt 22, 39 : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même »). La conversion de mon regard sur moi-même entraîne un surcroît de charité pour les autres et un surcroit de reconnaissance pour Dieu… la charité est diffusive !

Tu veux quoi pour Noël ?

Fort de cette triple signification du cadeau, maintenant que notre regard s’est fait plus juste… que faire concrètement ? Que faut-il offrir à Noël ?

Des petits papiers inspirés de ces lignes sur lesquels seraient inscrits : « Jésus est Le cadeau », ou « Tu es un cadeau pour moi », « Je suis un cadeau pour toi » ? Pourquoi pas… c’est juste et beau, mais cela pourrait être une solution de facilité ! Les cadeaux que nous serons invités à donner devront rappeler cela, mais à nous d’y mettre notre esprit, nos idées, nos talents.

Deux pistes semblent possibles : sobriété et créativité. Pour la sobriété, citons le pape François, toujours clair et engageant : « La spiritualité chrétienne propose une autre manière de comprendre la qualité de vie, et encourage un style de vie prophétique et contemplatif, capable d’aider à apprécier profondément les choses sans être obsédé par la consommation (…) C’est un retour à la simplicité qui nous permet de nous arrêter pour apprécier ce qui est petit, pour remercier des possibilités que la vie offre, sans nous attacher à ce que nous avons ni nous attrister de ce que nous ne possédons pas. Cela suppose d’éviter la dynamique de la domination et de la simple accumulation de plaisirs » (Laudato si, § 222).

Pour la créativité, permettez-moi de glisser ce petit témoignage de la fête de Noël l’an dernier avec la chorale de l’aumônerie étudiante d’Aix-en-Provence. Chacun avait tiré au sort le prénom d’un membre de la chorale et la consigne était claire : il fallait que cela soit « fait maison ». Résultat ? Par les échanges de ces dentifrices home made, poèmes, scrapbooks, bocaux, peintures, cookies et autres, une surabondance de simplicité et de joie. L’esprit de Noël en plein !

Le temps de l’Avent s’est ouvert. Qu’il soit pour nous, par la préparation de nos cadeaux, un beau temps de conversion intérieure et un heureux temps de créativité !

Abbé Thomas Poussier

Abbé Thomas Poussier

Diocèse d’Aix et Arles, ordonné en 2012. Ancien aumônier des étudiants d’Aix en Provence et vicaire en paroisse, il est aujourd'hui recteur du séminaire Saint-Luc à Aix en Provence.

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